Pourquoi nos corps, sont-ils vos territoires ?
Cette semaine, j’ai vu le mot “acquitté” hanter mes nuits et mes journées, comme un spectre qui revenait me visiter pour la énième fois. Pas parce que je suis à plaindre, pas parce que j’ai vécu exactement la même chose mais parce que l’histoire d’Annick Charette est trop familière, on me l’a répété trop souvent. Cette histoire, c’est celle de mes amies, c’est la mienne aussi, c’est celle de femmes que j’admire, c’est une peine qu’on porte toutes ensemble en silence. Chaque témoignage d’une amie nous étrangle, mais on comprend. On comprend, parce que nous aussi, souvent, on l’a vécu même si on n’en parle jamais vraiment. On ramasse des amies à la cuillère, on témoigne, on ne dit rien, on minimise, on essaie d’oublier, on se bat pour survivre avec les traces du corps de l’autre sur notre peau. Comme si notre corps avait été conquis et qu’on devait lutter pour y retrouver la souveraineté.
Le système de justice présent comporte des failles trop grosses quant aux agressions sexuelles et tellement de victimes tombent dedans.
À voir les jugements d’innocence et la prévalence des agressions sexuelles sur les femmes (87% des victimes sont de sexe féminin) on croirait que leur corps est considéré comme un territoire à posséder. On peut le détruire avec un bulldozer, défaire le paysage puis se payer un avocat dispendieux et on s’en tirer assez facilement.
L’écoféminisme en parle depuis longtemps; de ce rapport entre femme et territoire.
L’écoféminisme met en relation deux formes de domination : celle des hommes sur les femmes et celle des humains sur la nature. Comme les hommes dominent les femmes, ils dominent le territoire. Du patriarcat découle un capitalisme, qui détruit à la fois le territoire et opprime les femmes. Les écoféministes du Sud nous rappelle l’existence d’une troisième forme de domination, celle coloniale et post-coloniale sur les territoires du Sud et sur les femmes racisées.
On pourrait aussi parler des femmes autochtones, disparues et assassinées, dont on tait la violence subie. La violence qui leur est infligée, comme celle sur leur territoire, passe sous le radar est “normalisée”.
Les femmes travaillent davantage pour la protection de l’environnement et subissent aussi plus sévèrement les répercussions de la dégradation de l’environnement, particulièrement les femmes racisées. Selon des chiffres publiés par le Pew Research Center en 2015, au Canada, 77 % des hommes considéraient les changements climatiques comme un « problème sérieux », contre 90 % des femmes.
Les femmes luttent depuis longtemps, et lutteront toujours pour la protection du territoire.
En novembre 1980, près de 2000 femmes défilent à Washington en chantant et en frappant sur des tonneaux. Elles s’enchaînent aux grilles du Pentagone et crient, chantent. Elles protestent pour la vie de leurs enfants et la fin d’un écocide qui découle directement du régime patriarchal et capitaliste. Comme le font Mères au Front, aujourd’hui.
Vendaya Shiva, une célèbre éco-féministe indienne, s’est battue aux côtés de milliers de femmes pour la défense de l’agriculture paysanne contre des firmes agro-alimentaires en 1980. Les femmes indiennes étaient les principales paysannes et ont caressé des centaines d’arbres pour lutter contre une déforestation nuisible à l’agriculture et la planète. Elles ont réussi à protéger plusieurs territoires de cette façon.
Les femmes autochtones sont souvent les premières à lutter pour la protection du territoire. Le mouvement Iddle No more a été fondé par quatre femmes en décembre 2012 et vise la souveraineté et la protection du territoire pour les peuples autochtones. On peut aussi penser à plusieurs autres mouvements de résistance autochtones qui ont créés pour empêcher des projets meurtriers comme le pipeline Costal Gaslink, comme le mouvement du clan UNIST’OT’EN. Inclure les savoirs autochtones à la lutte est une nécessité.
Réapproprier son corps, comme on retrouve un territoire ami. Lutter pour la protection du territoire, pour la justice dans nos corps.
Pour en savoir plus sur l’éco-féminisme et être un.e allié.e dans ce mouvement
Écouter Le patriarcat contre la planète - Épisode Podcast de «Les couilles sur la table»
Lire Écoféminisme - Livre de Maria Miles et Vandaya Shiva
Lire Faire partie du monde - Livre d’un collectif de femmes par les Éditions Remue-Ménage
S’inscrire à Mères au front
Détruisons le patriarcat et engageons-nous toustes ensemble dans un monde meilleur.
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Courage